Le cheval de Renaissance, le précédent album Beyoncé, s'est mis à galoper sur la pochette de son huitième album Cowboy Carter. D'ailleurs, ces deux sorties espacées d'un an et demi sont liées par leurs sous-titres (acte I et acte II), racontant chacune l'exploration d'un nouveau genre pour la chanteuse pop/R&B. Après la house, musique prisée des Afro-Américains, c'est la country, musique fétiche des Blancs du Sud du pays, que Beyoncé revisite frontalement, drapeau américain au vent, en santiags et Stetson. Sans faire dans le Garth Brooks ou le Hank Williams modernisé, la chanteuse porte haut et fort ses origines texanes, avec un raisonnement simple : si je suis une artiste née à Houston, que mes parents sont originaires du Sud, qu'est-ce qui m'empêche de pratiquer ce genre musical et d'en revendiquer une forme de folklore personnel ? Un point de vue pas partagé par tous, puisque certaines radios country ont refusé de jouer le single Texas Hold 'Em, qui lui a permis de devenir la première femme noire en haut du top Billboard's Hot 100 Country. Ecrit avec Raphael Saadiq, Cowboy Carter allie compositions originales et hommages, comme ces reprises de Blackbird des Beatles et Jolene de Dolly Parton. Avec ceci de particulier que Beyoncé recherche la validation au milieu des pieds de nez, comme lorsqu'elle invite Willie Nelson a se muer en DJ de radio texane, diffusant des extraits de musique country chantée par des artistes noirs, puis invitant gentiment ceux que ça dérange à passer leur chemin. Et côté symbole fort, la mythique Linda Martell, première artiste country afro-américaine à s'être produite sur la scène du Grand Ole Opry et aujourd'hui âgée de 82 ans, a même été conviée à la fiesta de Queen Bey. Album méta chérissant les harmonies complexes, forcément politique, Cowboy Carter en dit autant sur son autrice que sur une Amérique voyant resurgir le spectre de Donald Trump.